Interview
Pourquoi avez-vous décidé de créer Friendship ?
Parce que j’aime aller là où personne ne veut aller. J’ai créé Friendship en 2002, avec mon mari, pour aider les familles oubliées de tous, déshéritées parmi les déshéritées, dans la province reculée du Bahmapoutre. Quand nous avons eu l’idée de transformer un bateau en hôpital flottant, personne n’a cru en notre projet. Même ma sœur se demandait si je n’étais pas devenue folle. C’est ce qui m’a motivée. Depuis 2002, je n’ai cessé de me battre pour cette région et je crois que les résultats sont là. L’autre jour, j’entendais l’une de mes collaboratrices dire à un partenaire : « Si vous ne croyez pas au changement, allez voir un village Friendship, vous changerez d’avis. » Cette petite phrase est un grand cadeau de la vie.
3000
micro-réseaux distribués
10000
familles bénéficiaires
Avec la Fondation ENGIE, Friendship installe des panneaux solaires dans les villages du Brahmapoutre. En quoi ce projet vous tient-il à cœur ?
Au début, Friendship n’a pas centré son action sur l’accès à l’électricité. Mais, petit à petit, c’est devenu une question centrale. Je me suis simplement rendu compte qu’en apportant la lumière, j’apportais tout. Avec la lumière, les enfants peuvent étudier plus longtemps à la nuit tombée – nous avons d’ailleurs constaté une nette amélioration des résultats scolaires avec l’arrivée de l’électricité. Les panneaux solaires ont aussi un impact positif en termes de santé et de sécurité, avec une baisse du nombre d’incendies liés aux lampes à kérosène et moins d’agression durant la nuit.
Last but not least, l’électricité apporte des compléments de revenus aux villageois. Les magasins peuvent par exemple rester ouverts plus tard. Nous sommes aussi en train de développer de nouvelles formes d’emploi, en formant des techniciens chargés de la maintenance des panneaux.
Le projet financé par la Fondation ENGIE a également reçu le soutien du gouvernement bengali, qui a décidé de le dupliquer à d’autres villages
Quels sont vos plus grands challenges pour l’avenir ?
Le plus grand défi, c’est le changement climatique. Au Brahmapoutre, les inondations et les cyclones se font de plus en plus fréquents. Les habitants des îles doivent parfois quitter leur maison du jour au lendemain. Dans ces conditions, il est plus difficile de construire des projets à long terme.
Je me bats aujourd’hui pour convaincre les chefs d’État et les grandes entreprises de l’urgence d’agir. Certains le font, à l’instar d’ENGIE qui a bien compris que le déploiement énergétique ne pouvait pas se faire sans penser, globalement, aux incidences environnementales, même dans les régions les plus reculées de la planète. Aujourd’hui, New York, Paris ou le Brahmapoutre, nous sommes tous sur le même radeau !