Toutes les trois secondes, une personne dans le monde est déplacée, contrainte d’abandonner son foyer en raison de la violence, des guerres et des dérèglements climatiques.

Face à ce constat, l’artiste Bryan McCormack a décidé d’agir. Il a pris son bâton de pèlerin, des feuilles et des crayons et a sillonné l’Europe entière, de camp en camp. Il a demandé à des réfugiés, majoritairement des enfants, de dessiner leur passé, leur présent et leur avenir. Depuis 2016, des milliers de dessins ont été rassemblés.

– Une installation réalisée à partir des dessins a été présentée lors de la Biennale de Venise en 2017.

– Les dessins sont aussi postés sur les comptes Twitter, Facebook et Instagram associés au projet.

De nombreux ateliers-débats sont également organisés dans des écoles ou dans des camps de réfugiés.

Une application éducative est en cours de conception, en partenariat avec plusieurs universités en Europe. Son but : fournir un contenu et des ressources documentaires sur les crises migratoires aux élèves et enseignants en Europe et en Afrique (à terme dans le monde entier). L’application intègre bien sûr des dessins, mais aussi vidéos et interviews des participants au projet.

Trois questions à... Bryan McCormack, artiste contemporain, Irlande

Initiateur du projet YTT (Yesterday, Today, Tomorrow)

Pourquoi ce projet ? Qu’est-ce qui vous motive ?
En tant qu’artiste, je cherche à c réer, au travers du dessin, un langage universel qui permet à chacun de mieux connaître et comprendre l’autre, en dépit des différences de cultures, de traditions ou de dialectes.

Concrètement, le dessin permet aux bénévoles dans les camps d’instaurer un dialogue avec les réfugiés. En effet, les jeunes bénévoles qui arrivent là-bas sont souvent complètement démunis : ils n’ont pas de formation en psychologie, ne parlent pas la langue des réfugiés ; les dessins sont pour eux une aide précieuse.

Les dessins permettent aussi de montrer un autrevisage des réfugiés. C’est particulièrement flagrant quand j’interviens en collèges ou lycées : quand je montre le dessin d’un enfant réfugié à un adolescent de treize ans, il se projette immédiatement, il comprend avec ses tripes. En vingt minutes, son regard est changé pour la vie.

Votre souvenir le plus marquant ?
Je me souviens de cette jeune fille chrétienne de Mossoul qui a marché seule jusqu’en Serbie, après le décès de ses parents. Je lui ai montré les commentaires que ses dessins avaient suscités sur les réseaux sociaux. Ses yeux se sont mis à briller, comme si un peu d’espoir jaillissait enfin, après des mois d’horreur. Voir se dessiner une lueur d’espoir dans les yeux des enfants, c’est la plus belle des récompenses.

Vos projets d’avenir pour YTT ?
Je mise beaucoup sur l’application YTT. Cet outil permettra aux enseignants d’expliquer les crises migratoires aux adolescents… avec l’aide des dessins, bien sûr ! L’idée est de proposer l’application aussi bien dans les pays d’accueil que dans les pays d’origine des migrants. En effet, je suis frappé par le manque total d’information des réfugiés qui décident de migrer. Ils quittent leur pays en ignorant complètement les risques encourus. J’espère que l’application, qui sera disponible dans les écoles de tous les pays d’origine des migrants, permettra de les sensibiliser aux dangers de l’exode.