CLIMAT ET BIODIVERSITÉ

« En tant que chefs d’entreprises et citoyens, nous avons la conviction que le sujet de la lutte contre le changement climatique et la préservation de la biodiversité sont une priorité absolue. Il ne faut surtout pas reculer. »
Jean-Pierre Clamadieu

2021 : 20 ANS DE PARTENARIAT ENTRE LE MUSÉUM D’HISTOIRE NATURELLE ET LA FONDATION ENGIE

Référence en matière d’inventaires de milieux naturels, de faune et de flore, sur l’ensemble de la planète, le Muséum apporte une contribution à la mise en œuvre d’accords internationaux relatifs à la protection de l’environnement. Il a pour mission essentielle de faciliter l’accès à la culture scientifique à tous les publics. Le Museum regroupe plusieurs sites notamment, le jardin des Plantes, le Musée de l’Homme, les jardins de Mention Agir en faveur de la protection de nos écosystèmes et de sensibiliser le grand public à ces enjeux fondamentaux a été au cœur des 20 ans de partenariat.

Quelques dates emblématiques :

  • soutien du Fonds polaire Jean Malaurie (2001-2007) : fonds documentaire consacré aux espaces arctiques et antarctiques pour permettre aux chercheurs et au grand public d’accéder à des sources d’informations uniques en France et dans le monde
  • rénovation des Grandes Serres 2010
  • soutien à la Rénovation de l’Ecole de Botanique inaugurée en 2011 : cette Ecole est le cœur du Jardin des Plantes, qui renferme 35 000 espèces de plantes différentes
  • soutien du programme de sciences participatives Vigie-Nature 2011-2013
  • 2015, mécène fondateur de la réouverture du Musée de l’Homme : soutien du Balcon des Sciences et création du prix de la fondation « talents de la recherche » sur le thème de la résilience de nos sociétés face au changement climatique W soutien à la restauration des fabriques de la Ménagerie du jardin des Plantes en 2017 et 2018

« Les sciences naturelles et les sciences de l’homme jouent un rôle essentiel pour aider à faire face aux défis de nos sociétés contemporaines »

Bruno David, président du Muséum

Le Muséum national d’Histoire naturel regroupe aujourd’hui quatorze sites, dont la Grande galerie de l’évolution, le Parc zoologique de Vincennes, le Jardin des plantes et le Musée de l’Homme… C’est aussi un réseau de 500 chercheurs aux profils variés (naturalistes, biologistes, géologues, ethnologues, anthropologues, vétérinaires, paléontologues…). Si leurs activités ne sont pas toujours visibles, elles sont pourtant essentielles pour comprendre les relations étroites entre biodiversité, climat et écosystème. C’est pour contribuer à les mettre en lumière que la Fondation ENGIE soutient les « Talents de la recherche » depuis plusieurs années.

3 FOCUS EN 2021

– Sensibiliser à la question de la biodiversité : 20 ans de partenariat de la Fondation ENGIE avec le Muséum d’Histoire naturelle

– Etudier le passé pour comprendre l’avenir, favoriser les recherches sur le thème de la résilience des sociétés face aux changements climatiques : le Prix « Talents de la Recherche » Fondation ENGIE – Musée de l’Homme

– Quand la biodiversité aide à lutter contre le handicap : l’offre pédagogique jeunesse et publics fragiles à la Station LPO de l’Île Grande, rénovée grâce à la Fondation ENGIE

POINT DE VUE

GILLES BOEUF

Sorbonne Université, Paris ; Laboratoire Arago, Banyulssur-mer, Professeur invité au Collège de France, Ancien président du Muséum national d’Histoire naturelle, Paris

BIODIVERSITÉ ET PANDÉMIES

« En décembre 2019, une pneumonie d’origine alors inconnue touchant 59 personnes a été signalée dans la ville chinoise de Wuhan, dans la province du Hubei. Il a depuis été établi que cette maladie émergente, devenue depuis une pandémie, était due à un Coronavirus (Sars-CoV-2). Elle a été dénommée Coronavirus disease 2019 ou Covid-19. Ce virus s’est répandu avec une vélocité effarante sur toute la planète. Ce qui n’aurait pas dû se produire s’est produit, ce qui n’aurait pas dû dépasser un petit impact très localisé s’est diffusé dans le monde entier en quelques semaines ». Nous écrivions ces lignes le 12 mai 2020 dans un article rédigé pour le Journal La Tribune.

L’origine de ce virus, et son caractère infectieux aigu nous le démontre, est certainement récente, quelque part durant le second semestre de 2019 dans cette province chinoise. Notre immunité « naturelle » n’y était pas préparée. Ceci est très réel pour l’Europe et l’Amérique, probablement moins pour les humains en Asie. De très intéressantes observations d’immunités croisées ont été mises en évidence dans un papier récent publié dans Nature, qui pourraient expliquer les survies supérieures face au virus dans cette région du monde. Les diverses épidémies virales survenues depuis quelques dizaines d’années en Asie auraient permis le développement d’immunités spécifiques et croisées. Quels sont les liens entre l’occurrence de cette pandémie et les activités humaines, comme l’accélération du changement climatique ou l’effondrement de la biodiversité ? Pour le climat, il n’y en a pas directement : il nous faut incriminer la promiscuité d’espèces d’animaux vivants stabulés dans des conditions innommables sur les marchés chinois, ainsi que le nombre (plus de 100 000 !) effrayant de vols sur la Terre tous les jours et qui contribuent pour 3,5 % à l’accélération du changement et au réchauffement de la planète. La chute de la biodiversité et l’effondrement du vivant sont encore précisés dans le dernier rapport du WWF « Indice planète 107 vivante » de septembre 2020, après le rapport de l’IPBES produit le 7 mai 2019 suite à la réunion à l’UNESCO à Paris de fin avril-début mai 2019. La nature décline globalement à un rythme sans précédent dans l’histoire humaine -et le taux d’extinction (ou plutôt du nombre des individus dans les populations sauvages) des espèces s’accélère- provoquant dès à présent des effets graves sur les populations humaines du monde entier. La santé des écosystèmes dont nous dépendons, ainsi que toutes les autres espèces, se dégrade plus vite que jamais. Nous sommes en train d’éroder les fondements mêmes de nos économies, nos moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la santé et la qualité de vie dans le monde entier.

C’est tout l’intérêt du programme « One Health » des Nations Unies. Une seule espèce est responsable de la pandémie de Covid-19 : la nôtre. Comme pour les crises climatiques et de la biodiversité, les récentes pandémies sont une conséquence directe de l’activité humaine, en particulier nos systèmes financiers et économiques mondiaux, basés sur un paradigme limité qui valorise la croissance économique à tout prix. A quand la suppression de ces marchés d’animaux vivants dans des conditions immondes en Asie, l’arrêt de l’extirpation effrénée d’arbres et d’animaux dans tous les écosystèmes du monde y compris les forêts tropicales, la fin des seuils de renouvelabilité du vivant sur terre et en mer bafoués en permanence et systématiquement franchis, la fin du gaspillage et de la souillure perpétuelle de l’eau, la fin de la « roulette écologique » consistant à transporter tout partout et à déclencher les explosions d’espèces invasives et ces disséminations anarchiques de pathogènes de tous ordres, virus et bactéries ou autres micro-organismes, responsables de ces pandémies et de tant de souffrance ? Si le « dialogue » entre les éléments de notre microbiote avec nos cellules humaines se dérègle ce sont de graves pathologies, obésité, diabète de type 2, hypertension artérielle, souvent associées à un manque d’exercice physique et à la « malbouffe ». Et tout ceci remplit les conditions, avec l’âge, pour justement devenir la cible préférée de notre Covid-19 ! Le virus se reproduit de nos fragilités…

En conclusion Le monde vivant est vieux de près de 4 000 millions d’années, il s’est formé à partir de ces premières cellules apparues dans l’océan ancestral, il a subi les pires crises imaginables et s’en est toujours sorti ; pour cela, il a dû en permanence s’adapter à des conditions extérieures changeantes. Mais pour s’adapter, il faut impérativement changer, ce que nous ne faisons toujours pas ! Quand cesserons-nous cette « myopie du désastre » ? Trop de consumérisme, pas assez de sobriété : rappelons-le nous en permanence, nous sommes fondamentalement eau, sels et cellules ! Inspirons-nous du vivant, qui accomplit tout avec une grande parcimonie d’énergie, qui ne s’auto-empoisonne jamais (il produit de redoutables substances mais sait les dégrader et a toujours un « acheteur » pour ses déchets), qui innove en permanence et pour tous. Nous avons besoin de la biodiversité pour survivre. Nous ne mangeons que cela et ne coopérons qu’avec cela ! Puisse un petit virus composé de seulement quinze gènes provoquer l’électrochoc collectif salutaire dont nous avons tant besoin…

PORTRAIT

Sebastião Salgado

Photographe et humaniste brésilien, Sebastião Salgado est reconnu internationalement pour son engagement en faveur des plus démunis à travers ses nombreuses expositions comme Le Sel de la Terre, La mine d’or de Serra Pelada ou encore Genesis. Il est également connu avec sa femme pour être à l’origine de l’Institut Terra qui a reboisé plus de 700 hectares de terres laissées à l’abandon après des années d’exploitation.

Vous et Lélia avez créé l’Institut Terra en 1998, quelle est votre ambition ?

Le Brésil a deux grandes forêts : l’Amazonie et la forêt atlantique (ou Mata Atlantica), une forêt tropicale humide localisée le long du littoral du Brésil. Sa biodiversité extrêmement riche et dense – 20 000 espèces de plantes dont 40 % sont endémiques – en fait aussi l’une des forêts les plus menacées du monde. C’est dans cette zone-clé, dans l’État du Minas Gerais, au sud-est du Brésil, que se situait la ferme de mes parents. En 1994, quand je suis rentré au Brésil, tout était détruit, j’en étais malade. Moins de 1 % des terres – de près de 700 hectares, ndlr – étaient encore pourvues d’arbres. C’est là que ma femme a eu la fabuleuse idée de replanter cette forêt. Et nous avons créé l’Instituto Terra, qui est devenue la plus grande organisation environnementale du Brésil. On vient d’avoir un financement pour planter 5000 sources d’eau, c’est le plus gros projet de récupération d’eau au monde ! On a déjà planté plus de 3 millions d’arbres et dans les prochaines années on va encore Sebastião Salgado Photographe et humaniste brésilien, Sebastião Salgado est reconnu internationalement pour son engagement en faveur des plus démunis à travers ses nombreuses expositions comme Le Sel de la Terre, La mine d’or de Serra Pelada ou encore Genesis. Il est également connu avec sa femme pour être à l’origine de l’Institut Terra qui a reboisé plus de 700 hectares de terres laissées à l’abandon après des années d’exploitation. PORTRAIT 109 en planter 1 million. Ce sont des arbres qui vont durer 1000 à 2000 ans. On a plus de 170 espèces d’oiseaux qui sont revenus, des jaguars, des singes, dans une forêt qui a été créée sur une terre complètement dégradée, qui n’avait plus d’eau.

Quel est votre prochain projet ?

C’est un projet sur l’Amazonie, on vient de compléter un travail de 7 ans. Fin 2019, quand la COVID-19 est arrivée, je venais de terminer de photographier. Avec Lélia pendant la quarantaine, on a édité, copié et préparé. On va faire une très grande exposition et éditer un livre de plus de 500 pages sur l’Amazonie. L’exposition se fera à la Philharmonie de Paris avec un concert de musique classique composé par Villa-Lobos, grand compositeur brésilien ayant beaucoup travaillé sur l’Amazonie, et une projection des photos. Il y a toute une présentation pour laquelle on pense pouvoir amener plusieurs de nos amis indiens qu’on a connus en Amazonie.