"Une espèce qui disparaît, c’est comme un livre qui brûle" - Sofiane Hadine

Interview

Sofiane surfe depuis l’âge de 13 ans, au Maroc, à Biarritz ou en Australie. Plus il surfe, plus il prend conscience de la façon dont les océans se dégradent, rapidement et visiblement. Et plus le temps passe, plus il se dit qu’il est impossible de ne pas réagir. Son diplôme de sciences politiques en poche, il intègre l’ONG Surfrider Foundation Europe en 2015.

Pourquoi avez-vous décidé de vous engager avec Surfrider Europe ?
Les surfeurs sont les baromètres de la pollution des océans ! Depuis des années, nous voyons les océans et les plages se couvrir de plastique. Avec le réchauffement climatique et les pluies qui s’intensifient, on constate aussi une pollution bactériologique grandissante : les surfeurs ont plus d’allergies qu’avant. Une chose aussi naturelle que se baigner dans la mer devient dangereuse. Cela me semblait tout bonnement impossible de rester sans rien faire…

Constatez-vous une baisse de la biodiversité dans les océans ?
En quinze ans, on est passé de 200 espèces affectées par les déchets aquatiques à plus de 600. Quant aux oiseaux, leur population est en baisse régulière, environ 1,5 million de moins chaque année. Si la pollution continue à ce rythme, des espèces risquent de disparaître. Or, si la biodiversité est comme la bibliothèque de la vie, une espèce qui s’éteint, c’est comme un livre qui brûle. Et c’est une perte irrémédiable : chaque espèce est le fruit de millions d’années d’évolution et l’homme ne sera jamais assez rapide ni doué pour réparer l’irréparable.

« Si une personne comprend que 80 % de la pollution des océans vient de l’intérieur des terres, c’est déjà une victoire ! »

Concrètement, quelles sont les actions menées par Surfrider pour sauver les océans ?
L’un de nos projets – Initiatives Océanes, soutenu par la Fondation ENGIE – consiste à donner les moyens à tout citoyen qui le souhaite d’organiser une collecte de déchets sur les plages. Surfrider fournit un kit pour l’aider à le faire (matériels pour ramasser, banderoles, supports pédagogiques…). Après la collecte, les participants remplissent des fiches qui recensent les déchets collectés. Les fiches sont envoyées à nos experts scientifiques qui les compilent et font un état des lieux de la pollution des plages en Europe. Cette mécanique relève de la science participative. Par ailleurs, les informations collectées sont aussi un outil qui permet à Surfrider de mener des actions de lobbying auprès des instances européennes. Le grand public ne le sait pas forcément, mais Surfrider est l’une des ONG qui a contribué à interdire les sacs plastiques en Europe.

Quels sont les projets de Surfrider Europe pour l’avenir ?
Nous souhaitons continuer à f aire de la pédagogie, encore et encore. Si une personne comprend que 80 % de la pollution des océans vient de l’intérieur des terres, c’est déjà une victoire ! Pour faire passer le message, nous continuerons bien sûr les collectes. Mais nous misons aussi sur le numérique. Nous allons bientôt sortir l’application Ocean’s Zero qui donnera, jour après jour, des conseils pratiques permettant à chacun d’agir concrètement pour la réduction des déchets.

Que vous apporte le partenariat avec la Fondation ENGIE ?
Nous apprécions que la Fondation nous accompagne sur les projets les plus innovants, mixant numérique et participation citoyenne.

55000

participants aux collectes en 2018

1400

collectes en 2018 dans le cadre du projet Initiatives Océanes soutenu par la Fondation ENGIE


"Sauvegarder la nature, c’est se sauver soi-même" - Joyce Capell

Interview

Joyce Capelli est éperdument amoureuse du Brésil, de ses habitants, de ses paysages. Après des études de chirurgie aux États-Unis dans les années 1990, elle décide de revenir au pays, pour aider les siens. Elle rejoint alors l’Institut Melhores Dias et consacre sa vie à a gir auprès des communautés les plus pauvres.

La biodiversité et l’environnement sont-ils un enjeu prioritaire au Brésil, alors que certaines communautés vivent dans la misère ?
Amener les plus démunis à protéger la nature, c’est leur redonner dignité. Et c’est essentiel pour les aider à p rendre leur destin en main, leur offrir un avenir.

Avez-vous en tête un projet qui montre le lien entre protection de la nature et développement des communautés ?
Je pense au projet « Clean Water, Healthy Children » soutenu par la Fondation ENGIE. Au départ, il s’agissait de sauver des familles menacées par la malaria, dans l’État de Maranhao, dans le Nordeste. Aussi incroyable que cela puisse paraître, les habitants faisaient parfois des kilomètres par jour pour aller chercher une eau complètement insalubre. Ce alors même que des sources d’eau potable se trouvaient à deux pas des villages. Nous avons travaillé avec les pouvoirs publics, les enseignants de 38 écoles et les familles pour retrouver, restaurer et protéger ces sources. Les enfants et leur famille sont sortis de l’expérience grandis, fiers… et plus confiants en l’avenir.

« Amener les plus démunis à protéger la nature, c’est leur redonner dignité »

Que vous apporte la Fondation ENGIE ?
La Fondation ENGIE est beaucoup plus qu’un partenaire financier. Les bénévoles du groupe viennent souvent apporter leur expertise dans le cadre de projets que nous déployons. Au-delà du savoir-faire et du soutien financier, la Fondation est aussi capable d’apporter du rêve. Je me souviens d’un enfant qui nous a dit qu’il rêvait d’un vélo pour Noël. Le vélo est bel et bien arrivé… envoyé par la Fondation ENGIE !

35

sources restaurées

1200

enfants bénéficiaires


"Il est trop tard pour être pessimiste" - Gilles Boeuf

Interview

Le biologiste Gilles Boeuf est aujourd’hui une référence en matière de biodiversité. De colloques en séminaires, du Collège de France aux plateaux radio et télé, il se bat sur tous les fronts pour sensibiliser les citoyens à l’importance de la biodiversité.

Vous vous insurgez souvent contre les discours trop alarmistes en matière de biodiversité. Pourquoi ?
Je crois qu’on vit une période dramatique, mais pas désespérée. Certes, il y a deux fois moins de lions, d’éléphants et d’oiseaux qu’il y a vingt ans. Certes, les trois quarts des insectes ont disparu sur cette période. Mais ce n’est pas en multipliant les discours fatalistes qu’on poussera à l’action. Je crois qu’il est trop tard pour être pessimiste. Au contraire, il est urgent d’être optimiste, pour avoir le courage de se retrousser les manches et faire acte de résistance.

Comment faire pour agir ?
Il faut laisser la nature tranquille et, doucement mais sûrement, elle se repeuplera, à la condition inéluctable qu’on ne la détruise pas. La nature est terriblement résiliente et capable de se réparer pour peu qu’on la laisse en paix. Prenez l’exemple des thons rouges, dont on avait prédit la disparition il y a quelques années. Des quotas de pêche ont été imposés et les thons rouges sont revenus. Mais l’harmonie est encore fragile. Il faut surtout, de toute urgence, prendre les mesures adaptées.

« Ce n’est pas en multipliant les discours fatalistes qu’on poussera à l’action »

Pourquoi avez-vous décidé de devenir membre du conseil d’administration de la Fondation ENGIE ?
Je considère que c’est une excellente nouvelle que des groupes comme ENGIE prêtent une véritable attention à l’environnement et à la biodiversité. D’où ma décision de travailler avec la Fondation. J’ai aujourd’hui le sentiment que les industriels ont pris conscience qu’il était de leur devoir de « sobériser » le comportement des humains sur la planète. Ils s’inscrivent dans une perspective à long terme qui leur permet d’innover, pourquoi pas en s’inspirant du vivant, pour sauver le bien-être humain sur Terre.